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sujet, possibilité connue empiriquement sous la condition du concept de succession. Mais le principe de contradiction, sous cette nouvelle forme, perd sa nécessité logique. En effet, nous sommes les propres sujets de notre pensée, et nous savons si nos idées s’accordent ou répugnent ; un philosophe voué à la méthode la plus empirique acceptera donc le principe de contradiction dans le premier sens, parce que, dit-il, il constate qu’il ne peut pas penser de la même chose, le oui et le non en même temps ; mais il ignore s’il a le droit de porter le même jugement des attributs d’une chose quelconque qu’il ne connaît pas, et si ces attributs ne peuvent pas être contradictoires.

Ainsi l’unanimité des philosophes se dément dès le premier pas où, sans examen, elle semblait forcée. En fait, le changement et le temps lui-même peuvent être niés, et, en ce cas, c’est la contradiction qui, loin d’être interdite, peut devenir pour un philosophe la clé des théories.

Le principe de contradiction est la loi régulatrice des applications de la catégorie de qualité à tous les phénomènes, il intervient dans les applications capitales de la catégorie de quantité aux phénomènes dans le temps et dans l’espace ; mais le rapport de sujet à attribut peut être rejeté comme n’atteignant pas l’essence du sujet ; des attributs contradictoires peuvent être non pas imaginés, mais posés, pour constituer ensemble sa vraie nature. De là des questions qui priment logiquement toutes les autres, en métaphysique, et ouvrent d’inévitables alternatives de doctrines, au premier moment où une affirmation est à risquer touchant la condition de ce qui est extérieur à la conscience individuelle.