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LE MONDE SUIVANT L’ANCIEN ESPRIT HELLÉNIQUE

définition des premiers principes de vérité et de réalité à l’explication de l'ordre actuel des choses.

La plus métaphysique, pour ainsi parler, des idées relatives à l’univers dans son ensemble est celle qui regarde sa raison d’être quant au temps. Elle s’est présentée certainement comme la plus difficile aux penseurs des antiques civilisations, et jamais elle n’a cessé d’être une cause de trouble pour l’entendement humain. La trace en est visible dans beaucoup d’anciennes cosmogonies; on voit deux puissantes idées s’y combattre dans l’esprit de leurs auteurs : d’une part, la constante expérience et l’habitude de la succession des phénomènes dont nul ne se produit sans avoir des antécédents, et, de l’autre, le sentiment du vouloir et de la cause qui gouverne les changements et par là les précède sans être précédé. La première idée conclut à l’éternité du monde, la seconde donne lieu à la recherche de quelque chose où le monde prend son origine.De là l’imagination d’une certaine masse confuse qui aurait toujours existé, et la conception de telle ou telle puissance active qui par l’abstraction de son concept semble échapper à la nécessité d’avoir eu un commencement. Quelquefois, le Temps lui-même, investi d’une vertu productive du développement des choses, est appelé à répondre par son idée seule à la difficulté du manque d’origine, sans posséder pour cela aucun pouvoir déterminé qu’on puisse nommer. Cette fiction à part, l’embarras est ordinairement levé par l’idée éminemment antique à laquelle on donne aujourd’hui le nom d’évolution universelle. L’évolution, en un sens légitime et correct de ce mot, soit appliqué à certaines séries de phénomènes naturels, soit employé hypothétiquement pour coordonner des séries qu’on suppose, est toute loi suivant laquelle les phénomènes procèdent d’un étal initial à un état final, l’un et l’autre