Page:Renel - La fille de l'Île-Rouge, roman d'amours malgaches, 1924.djvu/60

Cette page a été validée par deux contributeurs.
58
LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

roles, sans nuances, de leurs voix nasillardes. L’ensemble était étrange, exotique, inentendu.

Puis chanteuses et instrumentistes, lassés, s’arrêtèrent brusquement. Les Européens applaudirent. Claude s’informa de cette musique originale.

— C’est l’hymne du roi Radama, populaire autrefois, dit Berlier. Combien de fois je l’ai entendu !

— Est-ce très ancien ?

— Non… De l’antique musique malgache, il ne reste rien, ou bien peu de chose. L’Hymne à Radama date des environs de 1860. À cette époque, les missionnaires anglais avaient importé déjà dans l’île beaucoup de musique européenne.

— Voilà pourquoi, s’écria Cosquant, les Malgaches ont toujours l’air de chanter des cantiques !

— Exact… Ils ont plus entendu les sons de l’harmonium que ceux du violon.

— Cet hymne à Radama, reprit Claude, ne ressemble pourtant guère à la musique d’Europe.

— C’est vrai qu’on y entend comme l’écho lointain d’une mélodie barbare. Mais tout de même il est trop conforme aux règles de notre harmonie pour être complètement original.

— S’il était l’œuvre des seuls Imériniens, intervint Armand Desroches, vous n’y pourriez rien comprendre. J’ai entendu, dans les nuits d’Asie, se mêler au bruit sourd des grands fleuves les accords étranges de la musique anna-