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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

la maison était accompli. Claude eut de tristes réflexions.

Puis il songea qu’avec ses idées d’Européen il jugeait très mal la situation. Ralinoure possédait toutes les qualités des Imériniennes : aimable, douce, prévenante, prompte à deviner, à devancer les désirs de l’homme, elle avait été pour Berlier précisément la compagne qu’il souhaitait, l’avait soigné, pendant sa courte maladie, avec un dévouement maternel. Depuis des années qu’elle vivait dans sa maison, n’avait-elle pas le droit de se considérer comme son épouse selon la coutume malgache ? Si le vazaha avait pu prévoir sa mort prochaine, il lui aurait légué sans doute ce que contenait sa case, meubles sans valeur, bibelots de pacotille, linge usé, que les coloniaux liquident à vil prix, avant de rentrer en France.

En bas continuaient des allées et venues discrètes. Par la fenêtre ouverte, Saldagne vit un homme traverser le jardin : il équilibrait sur sa tête le gros paquet enveloppé d’un drap ; on eût dit un blanchisseur emportant le linge de la semaine. Ralinoure remonta ; elle tendit à Claude un lot de papiers, de lettres, de factures, retrouvées en fouillant les tiroirs ; il en fit une liasse, qu’il noua d’une ficelle, pour les trier chez lui, à loisir : rester dans cette chambre où il avait vu l’agonie de Berlier, lui devenait pénible.

En bas, il causa quelques instants avec la ramatou.

— Qu’est-ce que tu comptes faire, Rali-