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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

nienne. Sans le savoir, elle venait d’affermir en lui le retour vers le passé. Elle continuait à proférer l’ignoble injure, la pire qu’elle eût trouvée dans son vocabulaire :

— Coçon ! Coçon !

Il y avait une telle disproportion entre la situation vraie et cette scène grotesque, que Claude, énervé, se sentit tout près du fou rire.

Il réagit fortement, évoqua la triste image de Berlier moribond, et, calmé, il toucha doucement le bras de la ramatou qui répétait comme une litanie :

— Coçon ! Coçon ! Coçon !

— Berlier a une bilieuse hématurique. Il va probablement mourir. J’étais près de lui…

Razane regarda l’Européen, vit ses traita tirés, sa figure pâle. Elle crut. Son visage à elle se détendit. Avec une mobilité de femme primitive, elle reprit son expression habituelle, tendit sa bouche à Claude. Elle parlait maintenant de sa voix ordinaire, s’enquérait de Berlier, proposait d’aller tout de suite aider Ralinoure.

Saldagne s’étendit sur une chaise de bord, et recommanda, s’il s’endormait, de l’éveiller au bout de deux heures.

Au milieu du jour, après un repas sommaire, Il repartit avec Razane.

Le rez-de-chaussée de la maison, à Isourak, était envahi. Des Européens et des Malgaches du voisinage venaient aux nouvelles. Le boy, important, répondait, empêchait les gens de monter, selon l’ordre du docteur. Il laissa passer