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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

joie de vivre exaspérée par tous les nerfs vibrants, malgré les fièvres et les nostalgies. Claude fut ému d’une douleur secrète en devinant cette pensée étrangère qui répondait si bien à la sienne ; par une sorte de pudeur, il changea de conversation, s’informa du lieu où M. et Mme Ternières comptaient passer leurs vacances européennes. Elle répondit qu’après le temps habituel consacré à leurs deux familles, ils iraient sans doute en Italie. Tous deux évoquèrent alors mille souvenirs communs. Elle connaissait Florence et Venise où Claude avait fait de longs séjours. En précisant des dates, ils conclurent qu’ils s’étaient trouvés en même temps à Florence, cinq ans plutôt.

— N’est-ce pas, Madame, que le paysage florentin est un de ceux qu’on ne peut oublier ?

— Comme est inoubliable la vision de Tananarive…

— Le charme de la campagne, autour de Fiésoles, est plus doux et aussi prenant que celui de l’Imérina,

— Vous ne savez pas encore la nostalgie que vous aurez de ce pays, quand vous le quitterez.

— C’est vrai. Mais ici, je ne regretterai que la nature et la vie pittoresque des Imériniens. L’art de Madagascar, il vaut mieux n’en point parler…

— Vous souvenez-vous des couchers de soleil qui là-bas teignent en rose le Palais Vecchio. Ici le Palais de Ranavaloune est d’une couleur plus magnifique encore quand meurt le jour.