Page:Renel - La fille de l'Île-Rouge, roman d'amours malgaches, 1924.djvu/178

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
174
LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

Pour que le jardin ne fût pas dévasté, on leur avait apporté, dans la cour des communs, longue et droite, deux grandes corbeilles de riz blanc et un porc entier. Les voisins avaient prêté les pots de terre ou de fer disponibles. Chaque groupe, devant les cases rouges, disposa les cinq pierres pour placer deux marmites, l’une contre l’autre, au-dessus d’un grand feu de bois. Les gens, par village, étaient accroupis autour des foyers ; ils attendaient sans impatience que l’heure de cuire fût passée et que vint celle de se nourrir. D’énormes vases de terre brune, pansus et ronds comme des amphores, posés dans des couronnes de paille, étaient pleins d’eau fraîche pour les hôtes, assoiffés après une journée de promenade au soleil. De temps en temps l’un d’eux se levait, puisait le liquide avec une coupe d’argile noire, buvait lentement, en renversant la tête et égrénait dans un rayon de lune les dernières gouttes, comme une libation.

Le lendemain matin, tous étaient partis, mais sur le lieu de la ripaille, Claude retrouva les foyers avec les cinq pierres dressées en deux triangles au milieu des cendres refroidies, et ça et là des restes de riz et les ossements du cochon, que des rats musqués disputaient à des chats faméliques.

En évoquant ces scènes, Claude, machinalement s’était dirigé vers les communs. Quelques pierres, disposées en trépieds et noircies de cendres, témoignaient de récentes cuissons. Il était rare qu’aucune des cinq petites cases