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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

tecture officielle, des cases serrées les unes contre les autres se haussaient à l’assaut de la montagne : anciennes maisons malgaches en boue rouge, habitations plus modernes en briques cuites, dans tous les tons du vieux rose, avec les varangues grises supportées par des colonnes de pierre à chapiteaux de fleurs de lotus, ou demeures des Européens, flanquées d’arcades et de piliers, avec des fenêtres à volets blancs. Puis sur la pente plus raide, c’était un fouillis de rochers, de toits et de verdure. La montagne abrupte s’érigeait en à pic vertigineux, des masses de gneiss s’arrondissaient en surplomb ; des broussailles, des fleurs et des arbres s’accrochaient à cette muraille, buissons de roses blanches, cactus difformes hérissés d’épines, jacarandas bleus, lilas de Perse balançant au vent leurs grappes violettes. Au bas, des cases encore couvraient les éboulis de terre accumulés par les érosions. Puis la montagne s’abaissait rapidement vers le col de Souaniérane, et, en face d’Isourake, se dressait le sommet conique d’Ambouhidzanahâr, crevassé, avec des lessives blanches séchant sur les pierres au bord des tranchées profondes, couleur de sang. C’est aussi avec du sang que semblaient peintes toutes les vieilles cases. Ça et là, les grands édifices de bois, de pierre ou d’argile trouaient la masse des maisons rouges, se profilaient en haut de l’arête, sur le ciel bleu : le temple norvégien d’Ambouhidzatouve, avec les bordures étroites et blanches de ses hautes fenêtres, et son clocher disgracieux en tôle