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fois encore, après la mort de l’étranger, la légende de Ratsimanoutou allait se trouver confirmée.

Le lendemain donc, Lanthelme vint au même endroit, se débarrassa de ses habits, et, sans hésitation, entra dans la mer jusqu’à mi-corps. Il s’ébroua, fit jaillir l’eau tout autour de lui, revint en arrière pour se rouler sur le sable dans la vague presque tiède. Au bout de cinq minutes, il jugea ce premier bain assez long. Malgré lui, l’idée fixe des monstres qui pullulaient là-bas près des récifs de corail, hantait son imagination ; il ne pouvait se défendre de scruter avec quelque terreur les vagues troubles qui montaient vers la plage.

Soudain, comme il allait se retourner pour gagner le sable sec, il vit une masse noirâtre qui glissait obliquement de son côté : c’était le requin. A un mètre de lui, il y eut un remous ; un aileron noir et luisant sortit de l’écume ; puis la chose sombre et fuselée vira soudain ; venue avec le flux, elle disparut avec le reflux de la vague, dans les clartés glauques de la houle.

Alors Prosper Lanthelme s’évada de la mer cruelle, pour une fois miséricordieuse ; plus jamais il n’osa s’y baigner, quoiqu’il eût bu dans la source l’eau du poisson souroukay, sur la lointaine grive australe, au pied des cocotiers.