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ses compagnons. Il pleurait sur la plage et regardait vers l’Ouest, pour voir si au loin il ne découvrirait pas la terre. Mais il n’apercevait rien que l’eau salée. Puis, comme il avait faim, il attrapa des crabes qui couraient çà et là sur le sable, et, dans les flaques, des crevettes brunes à longues pinces. Le matin il grimpait en haut de l’îlot pour boire dans les creux de rochers l’eau saumâtre déposée par le brouillard nocturne.

Il vécut ainsi plusieurs jours ; pourtant les privations et le chagrin l’épuisaient, il sentait peu à peu ses forces décroître. Un soir qu’il pêchait, un énorme Souroukay arriva jusqu’auprès de lui dans la volute d’une vague, et dit :

« — Qui es-tu et que fais-tu tout seul dans cette île, homme de la Grande-Terre ?

« — Je suis Ratsimanoutou, de Nousivarika, là-bas dans le Sud ; ma pirogue a été brisée par le Grand-Vent-qui-tourne ; maintenant comment pourrais-je sortir d’ici, pour m’en retourner vers les miens ?

« — Qu’à cela ne tienne ! dit le poisson Souroukay ; d’ici Nousivarika, l’Eau-sacrée est longue à franchir, mais fortes sont mes nageoires, large est mon dos. Ramasse beaucoup de crabes pour te nourrir, construis sur moi une petite case en roseaux. Je te ramènerai jusqu’à ton village. »

Mon ancêtre obéit ; quand la case fut prête sur le dos du requin, il s’accroupit dedans. Le poisson fila