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puis reparaissait un peu plus loin, se hâtant vers un but inconnu. Cette espèce de course régulière et toute droite du groupe articulé qu’est le filanzane en marche, cette précipitation silencieuse des fourmis humaines dans le paysage immuable avait quelque chose d’exaspérant, de presque tragique.

Son filanzane à lui gagnait visiblement sur l’autre. Dix vigoureux porteurs se relayaient à ses brancards. Maintenant il se demandait si l’inconnu était un homme ou une femme. Un grand parasol blanc l’empêchait de distinguer. On l’écarta soudain. Pas de chapeau ; une tresse noire dans le dos : c’était une femme.

Cela devenait plus intéressant. Quelle espèce de femme indigène pouvait bien voyager en filanzane sur cette route ? L’épouse légitime d’un riche marchand houve ? ou celle d’un propriétaire betsileo ? Peut-être une ramatou de Tananarive, qui était allée voir sa famille à la campagne et retournait vers son vazaha ?

Une arrière-pensée obscure se levait maintenant dans l’esprit de M. l’Administrateur, célibataire et ramatouisant. Si c’était une jolie ramatou ? Presque toutes sont faciles. Or, à l’heure qu’il était, dans cette direction, cette femme ne pouvait guère s’arrêter qu’au village de Fiadanana, où il allait lui-même. Avant, il n’y avait pas un hameau ; ensuite,