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tremblements, il jetait la tête en avant et en arrière, semblable à un sanglier frappé d’une sagaie au défaut de l’épaule, des larmes coulaient sans discontinuer le long de ses joues, la corne tirait et secouait sa main, il titubait avec des gestes saccadés ; chaque fois qu’il se tournait d’un côté, les hommes massés dans la case reculaient instinctivement, comme s’ils avaient eu peur d’être désignés par lui.

Tout à coup on perçut un faible gémissement dans le coin où Ranourou berçait son enfant : Faralahy, le dernier né, râlait ; un spasme souleva sa poitrine, ses mains amaigries se crispèrent sur le lamba de sa mère ; elle jeta un cri de désespoir :

— Maty ! Maty[1] !

A ce moment le mpanô-oudy fit taire sa valiha, par respect pour le petit souffle qui venait de s’envoler. Ranaivou cessa d’être en transe, il regarda le Coin-des-Ancêtres avec une expression de terreur folle, se frappa la poitrine à grands coups avec la corne et cria :

— C’est moi qui ai fait mourir mes enfants, moi ! moi ! moi !

Puis, effondré par terre, il demeura gisant comme un cadavre, la figure cachée entre ses deux bras. Alors la gerbe du premier riz de l’année précédente, suspendue d’après le rite au Coin-des-Ancêtres, se détacha

  1. Mort.