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— Chez les Bara, un homme riche a toujours plusieurs femmes. Plus il est riche et plus il en a. De tous les rois des Bara, c’est moi qui en ai le plus. Mais chaque peuple a ses coutumes, léguées par les ancêtres. Toi aussi, tu es un grand chef, quoique tu n’aies qu’une femme. Je t’aime beaucoup, M. l’administrateur ; veux-tu devenir mon frère de sang?

Refuser à un Bara d’être son frère de sang serait lui faire une injure mortelle. Du reste l’administrateur, au point de vue politique, ne voyait que des avantages à s’unir d’un lien indissoluble avec le chef le plus influent de la région. L’offre fut donc acceptée et la cérémonie du fatidra[1] fixée à l’après-midi même.

Elle eut lieu, selon le rite habituel, sur la grande place voisine des cases royales. Un espace libre, au milieu, avait été réservé : les guerriers bara s’y accroupirent en cercle, avec leurs sagaies, leurs fusils et tous leurs oudy ; en arrière se tenaient les enfants et les femmes.

Dans un grand plat en bois, plein d’eau, on mit solennellement une poignée de terre prise à une certaine profondeur, une pincée de cendre recueillie au milieu du foyer, sept grains de riz, sept brins d’herbe, une pièce d’or et un peu de sang d’un bœuf égorgé pour la circonstance. Puis on y plongea une sagaie, la pointe en l’air, l’antsourou[2] reposant sur

  1. Serment du sang.
  2. Fer non tranchant adapté au talon des sagaies pour faire contrepoids à la pointe.