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dont on sait encore les noms, – et les parents récemment trépassés, dont on se rappelle les visages.

Un soir elle rencontra l’aye-aye, l’animal étrange qui vit, dit-on, dans les cimetières : il était assis sur un poteau d’offrande, le long duquel pendait sa grosse queue fauve. Ses grands yeux ronds luisaient d’un singulier éclat jaune. Il parut à Iasitera qu’il suçait son doigt, comme un petit enfant. Il poussa, en la voyant, des gémissements très doux, et elle s’enfuit, épouvantée.

Une fois qu’elle traversait le Mangourou en pirogue, elle aperçut, dans les profondeurs du fleuve, des formes blanches ; elle connut que c’étaient les Zazavavindranou, les Filles-d’Eau ; parfois elles entraînent dans leurs mystérieuses demeures les piroguiers imprudents, qu’on ne revoit jamais plus. Iasitera eut envie de se laisser glisser dans les eaux noires pour devenir, elle aussi, une Zazavavindranou ; mais, au moment où elle se penchait, elle entendit le vent parler dans les feuilles des arbres, au bord du Mangourou ; elle regarda la forêt et se souvint du chant de l’Oiseau-d’Argent, qui l’avait appelée.

Elle était obsédée du désir d’entendre encore une fois sa chanson. Cinq lunes s’étaient succédées depuis l’étrange soir. Tous les jours elle allait, vers la tombée de la nuit, s’asseoir au pied de l’arbre où