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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

— Madame, donnez-moi une chambre. Je vais vous faire une fiche avec un autre nom…

— Un nom faux ?

— Non, Madame, au nom de ma famille.

Elle bougonna et me tendit un nouveau papier. J’écrivis le nom de mon arrière grand’mère Marie Belcombes.

Elle me mena ensuite au sixième dans une chambre déplorablement fatiguée, où rien ne tenait. Cela sentait étrangement l’essence et les parfums gras. Je lui remis mes vingt sous. Elle me demanda à l’oreille :

— Combien d’argent avez-vous ?

— Six francs, madame…

— Gardez-les. Et ne dites rien ! Puis elle redescendit.

Je me couchai le ventre vide, car j’avais eu l’intention de louer la chambre, puis d’aller prendre à nouveau une tasse de café et le petit pain, devenu ma seule alimentation. Mais je comprenais que pour vingt sous, on louait durant le seul temps où l’on se trouvait dans la chambre. Il devait advenir souvent que des couples y vinssent passer cinq minutes. Sortant, je n’étais plus locataire. Il me fallait attendre le lendemain matin pour apaiser ma fringale. Une répugnance atroce me venait à l’idée de boire l’eau du pot qui, avec la traditionnelle cuvette, ornait la table de toilette.

Cette nuit fut hideuse. Je ne m’endormis que vers quatre heures du matin après avoir entendu sonner à je ne sais quelle horloge toutes les heures, les demies et les quarts. La tête me tournait dans ce lit où je me réchauffais mal et grelottais parmi les cauchemars.

Au matin je connus enfin le repos. À dix heures je m’éveillai. Vite habillée je descendis. Passant devant le bureau de l’hôtel, la patronne me vit et