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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

Je m’abandonnais, sachant qu’un corps mou et sans volonté apparente est plus difficile à transporter que s’il se débat. Surtout étant donné dans mon cas la vanité de toute lutte purement musculaire.

Le cocher m’étendis sur le meuble, jambes pendantes. Mes bras s’allongèrent, le droit toujours nanti du tisonnier, dans l’axe du corps. Les yeux dilatés, glaciale de la tête aux pieds, avec un avant-goût de la mort, je voyais ses actes comme si j’avais été bien loin. Sa main vint à ma gorge et je sentis le pouce prendre appui sur mon larynx. Je ne bougeai pas. Une sorte de rire funèbre et bestial dilatait la face immonde à trente centimètres de mon visage. Mais, par dessus l’instinct du meurtre que je lisais à la rentrée de la tête dans les épaules, à la contraction des maxillaires et à l’avancée de la mâchoire, l’instinct sexuel passa soudain. Je voyais le sang bondir à ses tempes gonflées. La main quitta ma gorge et l’homme eut un reniflement voluptueux. Une seconde il me contempla étendue devant lui, et, je crois… je crois bien entendu, car je ne vis rien d’autre, qu’il fut agité par un spasme. Il fit un geste violent, souleva ma jupe, et, durant un instant dont le souvenir m’angoisse encore à rappeler, il eut quatre ou cinq hoquets accompagnés d’une sorte de braiement entrecoupé. Tout le sang m’était reflué au cœur. Je me sentais gonflée à éclater. L’autre, avec un dernier soupir plus sonore me prit alors par la cheville gauche pour m’écarter les jambes.

Je me crispai. Il sentit la résistance et saisit plus haut le jarret. Mes deux jambes serrées montèrent ensemble un instant. Son effort retint la gauche et la décentra. Alors, offrant le hiatus attendu, la jambe droite se releva seule, repliée comme un ressort. Je vis le genou tendant la soie du bas, au ras de mon visage, puis, d’une ruade désespérée,