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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

avec quoi ? Les pensées remuaient frénétiquement dans ma tête et j’allais, attentive à maintenir mes distances, parvenant à éviter ses coups inattendus car il sautait ici et là, faisait des feintes et même une fois tenta de passer par dessus le bureau. Mais durant qu’il allait être déséquilibré pour cette escalade et ce passage, il sentit que je tenterais quelque chose de dangereux pour lui. De fait, je m’étais arrêtée alors, tendue et combative… Je ne savais pas ce que je ferais, mais il eut peur. Il voulut alors m’attraper à la course, si je puis dire, et deux minutes passèrent à nouveau en déplacements vertigineux. Soudain, comme immobile, il me guettait en rattrapant sa respiration, car, vite essoufflé, il avait des ahans bovins, je vins me placer dans un lieu tel que la cheminée se trouva droit sous son regard. Avec la cheminée, je vis le tisonnier, une forte tige de fer, longue comme une épée, debout à quatre pas du bureau. Mon regard s’y fixa comme la limaille vient à l’aimant. Au même instant l’homme tenta encore un effort, il courait comme un fou, je fuyais de même. Il avait l’air d’un fauve affamé qui tourne autour de sa cage. Pour me faire peur il me montra de lui quelque chose.

— Oh ! Oh !

Soudain il s’arrêta. Il parut épuisé. Je ne valais pas grand chose, mais la vue du tisonnier m’avait donné une surhumaine vigueur. Et comme l’homme était appuyé à la bibliothèque, ce qui me rapprochait de la cheminée, d’un bond, agile comme une dryade, je sautai hors de ma protection, hors la garantie du vaste bureau. En trois pas je vins à l’arme. Je la pris et regagnai la table sans arrêt. Cela s’était fait aussi vite qu’un humain peut accomplir une série aussi complexe d’actes. Le cocher s’était élancé à son tour. Il me manqua entre la fenêtre et la table. Je sentis le vent qu’il dépla-