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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

Il penche la tête sur l’épaule droite en parlant.

Il me prend le bras :

— Allons prendre un glass à côté…

Voici un café qui vient d’ouvrir, car il y a, en ce lieu, des cafés qui ferment et d’autres qui ouvrent à toutes heures depuis minuit.

Mon compagnon m’emmène au fond, loin de la porte et du comptoir où somnole le patron ; un drille épais, blême et ursin.

— Que veux-tu prendre, petite ?

Je le regarde :

— Tout à l’heure, vous me disiez vous.

— Oui, bien sûr ! mais ça frime mal de dire vous ici…

Je murmure :

— Je n’ai pas soif.

— Mais tu as faim, rit l’homme.

Il ajoute en me regardant :

— … Même si tu es une fille sage, fais-toi à mes façons. Je n’aime pas le genre discret et petite oie blanche. Je le trouve impoli. Je te dégotte à cinq heures dans le Faubourg, parle et agis comme les femmes de cette heure-là, les règles de la civilité le veulent…

— Parler, ça se peut, mais agir…

— Crains rien ! je ne te demanderai pas de trucs passionnés. Je veux causer un peu avec toi, ensuite j’irai me coucher.

Je prends de l’audace. Je lui réponds :

— La très belle qui vous attend va être furieuse de votre retard.

Il hausse les épaules.

— Elle a passé la soirée dans une fumerie. Qu’elle se débrouille si elle a besoin d’un homme. Moi, je ne suis pas porté pour le Bénarès, ni pour ses conséquences voluptuaires.

— Pour quoi alors ?…

— Ah ! curieuse, regarde :