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LA CULOTTE EN JERSEY DE SOIE

Biskra s’avance cauteleux prêt à sauter sur le Bombé, mais l’autre tourne et parvient, d’une détente, à passer son couteau près du visage de son ennemi dont je vois la tête se renverser en arrière.

— Si t’avais eu le bras assez long, dit la blonde, qui seule semble avoir droit de discourir ici, tu lui aurais ouvert la gargue, mon vieux Bombé… Puis, indifférente, relevant sa jupe brève, elle tire ses bas écarlates sur des cuisses fortes.

— Oui, mais en attendant il prend ça dans les endosses, crie Biskra en portant de trois quarts un coup de couteau aux reins que j’ai su depuis être une spécialité napolitaine.

Bombé pousse un cri grinçant et se précipite. Les deux hommes s’étreignent soudain. Je vois les lames apparaître puis s’évanouir, renaître et s’effacer. Ils s’égorgent férocement, se dilacèrent avec une sorte de rage animale. Ils tombent. La blonde murmure :

— La gosse sera ni à l’un ni à l’autre.

Tranquille, elle s’approche alors pour admirer de plus près les sursauts des deux misérables.

Je vois un des spectateurs mâles se pencher vers l’autre et dire quelque chose tout bas. Je devine :

On va leur faire les poches, quand ils vont être claqués.

Puis tous deux viennent regarder au-dessus du groupe enlacé dont le sang commence à faire une mare noire.

Je sens le courage gonfler mon cœur. Je regarde autour de moi, prompte et décidée, puis, bandant toute ma force, d’une détente de mes jambes qui me semblent devenus des ressorts merveilleux, retenant mon souffle et pliant les bras, je m’élance devant moi.

La rue est en pente. Les deux femmes âgées ne prétendront pas me rattraper, avec leur graisse et leurs muscles déshabitués des sports, car je suis