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Pygette levée alla voir ce qui se passait dehors. Sa nudité toutefois pouvant offusquer les gens d’en face, elle se couvrit par devant d’un morceau d’étoffe ramassé sur un fauteuil.

À ce moment une voix sombre et brutale sonna dans le silence de la chambre.

— Dis donc, toi, veux-tu, je te prie, laisser mon veston.

Pygette se retourna. Elle l’avait oublié ma foi, et faillit même s’en émerveiller mais sa joie du beau temps tomba d’un coup. Hélas ! elle n’était pas seule. De son métier, femme dite légère, charmante petite prostituée tirant son gagne-pain du plaisir donné aux mâles, elle se trouvait nantie depuis minuit d’un compagnon, d’ailleurs grincheux, qui habitait son propre lit en ce moment et semblait même désireux de s’y incruster.

Elle vit la face rogue et rase étalée parmi l’oreiller écrasé et un frisson lui parcourut l’échine. Elle avait dû en se levant réveiller le personnage, et maintenant il allait peut-être renouveler des exploits amoureux dont le seul souvenir aurait dégoûté Pygette de l’amour. Quelle maladresse !… Ainsi, nue et triste, ayant laissé tomber le veston sur le tapis, elle regardait le lit dans une angoisse non dissimulée et ne disait mot.

— Allons, viens te recoucher ! dit l’homme.

Pygette voulut éviter les conséquences de cet ordre menaçant.

— Non, écoute, mon petit, tu comprends, moi j’ai faim, je m’habille et je descends. Il est bientôt midi.

L’autre sortit des draps un bras menaçant et poilu.

— Je te dis de te recoucher. Tu sais que je ne suis pas de ces types qu’on charrie en douce. Prends garde à toi !

Mais le beau soleil qui lui inondait le dos de lumière chaude donna du courage à Pygette. Elle leva la voix :

— Et puis zut ! tu m’embêtes. T’en as assez fait depuis qu’on est au lit. C’est barca. Moi j’en ai marre.