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un moment, puis la fatigue la saisit. Elle s’arrêta dans un bar, regarda derrière si on la suivait puis vint, la figure défaite et la respiration tremblante, prendre un café qu’elle but bouillant sans s’en apercevoir.

Que lui fallait-il faire ? La peur se nuançait en elle d’un désir véhément d’échapper à la meute policière qui devait suivre sa piste. Elle regretta une minute d’avoir fui le Balte généreux. Mais, à l’idée de retourner voir s’il était resté à la terrasse, elle songea à ces deux hommes qu’elle avait croisés et qui paraissaient chercher quelqu’un.

Mais que faire ?

Elle avait une cinquantaine de francs sur elle, c’est-à-dire trop peu pour prendre le train et se rendre telle quelle dans une station balnéaire où son petit négoce put se pratiquer avec intérêt. Rentrer prendre le reste de son argent chez elle ne lui vint même pas à l’esprit. La police y était peut-être encore…

Alors, pour ne pas rester dans la rue ni aller de bistro en bistro en se faisant remarquer, Pygette qui reprenait goût à la vie décida de se rendre chez sa meilleure amie Syphone, ainsi dénommée parce qu’elle avait assommé à coups de siphon un homme qui voulait lui voler ses boucles d’oreilles. C’était une petite femme décidée et combative, dévouée, d’ailleurs, mais d’une lubricité extrême.

La demeure de Syphone était proche, Pygette la gagna avec prudence en regardant bien autour d’elle.

La porte étant ouverte en bas, la jeune femme monta sans avoir d’indication à donner, et, pensa-t-elle, sans laisser de traces. Parvenue au cinquième, elle sonna. Comme personne ne répondait elle frappa. Enfin un pas léger fut perçu derrière la porte.

— Qui est là ?

— C’est moi, Pygette.

— Comment, c’est toi, Pygette ?…

L’huis s’ouvrit. À demi enveloppée dans un kimono