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iv

La Fuite


Voici ce qu’avait lu Pygette sur le journal :

On sait que voici trois jours une jeune fille de Montmartre, d’excellente famille d’ailleurs, mais que le goût des plaisirs étranges avait poussé à la fréquentation des prostituées, avait été trouvé inanimée chez elle sans qu’on sût s’il fallait attribuer sa mort à une intervention étrangère.

Or, de l’enquête suivie avec soin et perspicacité par M. Lagonflette, le distingué commissaire aux Délégations Judiciaires, et trois des plus subtils inspecteurs de la brigade montmartroise, il résulte que la jeune fille dont il s’agit aurait été empoisonnée. Les soupçons se localisent sur diverses femmes de mauvaise vie dont une certaine P…te, dont nous n’osons écrire le nom, car cette personne, de moralité extrêmement basse, a eu l’idée de le choisir signifiant, avec une obscène désinence française, la même chose que le nom dont on nomme la Vénus Callipyge. Une perquisition a été prévue pour ce matin et sera accomplie quand nos lecteurs liront ces lignes. Elle donnera certainement des résultats et le mandat de dépôt l’accompagnera.

Pygette connaissait et redoutait la police des mœurs, mais elle avait une terreur folle de la police judiciaire. Les tribunaux lui semblaient une chose si épouvantable qu’elle eût cordialement mieux aimé se jeter à la Seine que d’être condamnée à seize francs d’amende. C’est dire quelle horreur régna en son âme lorsqu’elle lut l’entrefilet de Paris-Tout. Elle ne connut plus rien, ni le client, dont elle attendait une manne abondante et méritée, ni le terme menaçant, dont elle ne possédait jusqu’ici qu’un tiers en espèces, ni quoi que ce fût de ses tourments coutumiers. Elle eut peur. Une peur irraisonnée et stupide qui lui fit prendre le premier passant pour un policier chargé de l’arrêter. Elle courut ainsi