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ENTRE DEUX CARESSES

engloutirent non pas soixante-dix millions, mais trois cents dans les seuls travaux préparatoires. L’âme des foules est ainsi faite que le succès forçait les deux associés à exagérer constamment l’envergure de leur entreprise. Il fallait toujours augmenter le capital social. Les petites gens protestaient avec une violence féroce lorsqu’on n’acceptait pas leurs souscriptions. Ils disaient leur rage de voir les riches seuls accaparer cette magnifique affaire. Et les riches accusaient Mexme d’être bolcheviste et d’aspirer à on ne savait quelle louche popularité lorsqu’il prétendait préférer les petits souscripteurs aux gros.

À toute force, le monde entier voulait donner son argent. Le directeur d’un journal de chantage, ayant un jour publié un article pour dire que l’affaire n’était pas si belle que ça, vit son bureau pris d’assaut par une cohorte d’actionnaires. On le bâtonna jusqu’à la mort incluse.

Et la folie crût encore. Mexme et Séphardi recevaient chaque jour cinq cents lettres de braves gens qui voulaient acheter des actions des Pétroles Narbonnais, non pas au cours de Bourse, mais avec une majoration de trente pour cent.

Les chefs de l’affaire se connurent débordés. Dans une telle situation les sous-ordres devenaient des personnalités d’une importance effrayante. Or, on n’avait fait que des choix provisoires, il se pouvait qu’il y eut, parmi eux, des traîtres capables de créer de toutes pièces un de ces accidents qui, chez les foules exaspérées, font