Page:Renee-dunan-entre-deux-caresses-1927.djvu/47

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
47
ENTRE DEUX CARESSES

rouge se démener sur leurs instruments de musique. Un maître d’hôtel en frac passa, glabre, digne et compassé, portant un seau de glace ou trempait une bouteille de champagne coiffée d’or.

Alors Jeanne vit…

Sortant d’un couloir qui menait certainement à ces cabinets particuliers où la débauche ignore toutes vergognes, un couple se dirigeait vers la sortie. Jeanne Mexme reconnut l’homme : Séphardi, et enfin la femme : elle-même…

Mais la Jeanne entrevue n’était point celle d’aujourd’hui. Cette grande bête souple et onduleuse, les seins presque nus dans une robe bas-décolletée, la face lasse et irritante comme après le plaisir, marchait avec un lascif déhanchement. Elle riait aussi en une étonnante attitude de fille, la tête renversée, tandis qu’entre ses paupières filtrait un regard lubrique et dur.

Jeanne Mexme, horrifiée, se crispa. Elle crut courir, sans savoir où, dans son avenir comme dans une forêt, pour y localiser l’abominable scène. Les mâchoires serrées, les vertèbres froides, elle eut voulu mourir de rage en ce moment.

Elle ferma encore ses yeux affolés et se contint pour demeurer calme. Au bout d’un instant elle regarda à nouveau.

Le tableau changeait. Il se formait peu à peu, comme par des retouches insensibles, une autre figure ; puis ce fut…

Une sorte de paysage exotique, une combe tropicale écœurante de complexité. Les arbres