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ENTRE DEUX CARESSES

de l’or, seulement possédé ou détenu. Avec ses vingt mille dollars, Mexme eut tout bravé, dans la victoire déjà acquise sur la fortune. Dépouillé de cette richesse, amassée en Amérique avec une magnifique alacrité, il ne se sentait plus rien. La connaissance qu’il acquérait maintenant du peu qu’est l’homme pauvre et seul faisait déborder en quelque sorte son découragement.

Il souffrait de n’avoir plus d’espoirs fixes, de ne plus sentir au fond de sa pensée ces désirs ardents et moteurs, dont la présence rassure l’homme inerte sur sa capacité d’énergie.

De plus, le sentiment des menaces pesant sur lui prenait une forme directe et aiguë. Il côtoyait tous les jours des agents de la Sûreté qu’il reconnaissait à de frêles indices, certains pourtant. Il songeait que tous ces hommes eussent son signalement avec eux. Ce lui apportait à l’esprit une sorte d’ironique mépris pour la société. Mais il suffirait que l’un de ces policiers songeât, une fois à comparer son voisin avec une fiche à portée de sa main… et on ne lutte pas contre un si capricieux hasard.

Mexme avait pu, en ce temps où il était une force, quand le Gouvernement ne demandait que de le voir libre, subir la plus ignominieuse et patente injustice. Aujourd’hui, personne, s’il était arrêté, ne le défendrait plus. Être innocent réclame beaucoup de prudence. Mais quelle prudence exiger de cet homme défait, réduit à vivre