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ENTRE DEUX CARESSES

— Je ne le crains pas du tout. Je le voudrais bien.

— Alors vous ne seriez pas Joseph.

— Essayez…

Et Mexme s’aperçut qu’il n’est point de plus puissant aphrodisiaque que le malheur et le danger…

. . . . . . . . . .

Jeanne Mexme et Séphardi rentraient en auto dans le Paris matinal. À travers les vitres des portières ils voyaient les premiers ouvriers apportés par l’aube quotidienne aux labeurs de nettoiement. Ils jetaient, sous des casquettes enfoncées, du haut de leurs costumes boueux, des regards de haine à ces heureux de la vie qui terminent juste leurs débauches quand le peuple s’éveille. Une clarté adorablement bleue filtrait du dehors, couvrant toutes choses d’un vernis d’azur lacté. Silencieusement l’auto filait, inscrivait des courbes subtiles dans les tournants et rejetait en éclaboussements sales l’eau qui ruisselait sur le pavé parisien.

Indolente et froide, Jeanne regardait tout cela orgueilleusement. À chacun de ses gestes les brillants et les perles chatoyaient dans la clarté neuve. La soie des vêtements crissait et le velouté des fourrures traînait une sorte de chatouillement dans l’air attiédi. Elle songeait à Georges, son mari, évadé, et qui peut-être la cherchait déjà ici. Les visages des rôdeurs ne l’émouvaient en rien. Mais ce n’étaient que faces vaincues et affaissées, yeux