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ENTRE DEUX CARESSES

ferait à Paris et même il eût pu se demander ce qu’il venait faire en France. Un instinct le ramenait, voilà tout. Il obéissait…

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Mexme trouva deux basques propriétaires d’une barque véloce. Il leur avait exposé ses vues. Rien ne leur parut plus facile. Un matin, avant l’aube, il s’embarqua donc avec eux. Il n’avait aucun bagage, sa fortune étant toute en billets d’Amérique. Il portait toutefois deux revolvers. La crique où l’on prit le départ était abritée et la sortie en fut difficile. Mais, sitôt en mer, la brise étant forte et la voilure étalée, on prit du large avec promptitude. La côte espagnole s’effaça. Un souffle dur tannait les visages. Les deux pêcheurs menaient leur esquif avec une admirable virtuosité. Le jour vint. Assis sur un banc bas, surveillant soigneusement ses hommes et la mer, Georges Mexme vit se lever un soleil de soie rose. La côte devint une mince accolade violette sur la laque flave de l’orient. Dans un ciel très clair des loques crémeuses couraient au sud-ouest. Sous une lumière mille fois réfringée, la mer semblait faite d’une multitude de flots séparés : acide, huile, café, encre, graisse, eau savonneuse, goudron et métal fondu. La barque marchait vite. À intervalles, la voilure frappait sèchement l’air vibrant. La carène grinçait. Une lente balancée portait l’embarcation à droite et à gauche de l’axe de marche. Le mât décrivait de longues spires.