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ENTRE DEUX CARESSES

Ces Indiens vous ramenaient au camp spécial pour évadés, d’où nul ne revient et qui gîte très haut entre deux fleuves torrentueux et peu franchissables : l’Italy et le Marouinu. Là, impossible désormais de descendre vers la mer. Des cours d’eau aux rapides tourbillonnants, le Camopi, l’Approuague et l’Oyapock ferment invinciblement la route. Il faudrait dès lors s’évader vers le cœur inexploré du Brésil, où la sylve n’a jamais rendu les explorateurs.

Mexme méditait tout cela. Avant son passage en Cour d’assises, sur un conseil voilé de Me Joachim, il avait longuement étudié la cartographie guyanaise. Comme il avait de la méthode, il s’était occupé à chercher la base théorique d’une évasion, en partant des divers camps où l’on pouvait l’expédier. La carte de d’Anville qui date de 1729, celles de la Condamine (1745) et de Mentelle (1774) lui avaient appris leurs secrets. Il avait calculé d’après Jeffrys (1755) et fait ses plans d’après Thompson (1783), car ces gens en savaient autant — et peut-être plus — qu’aujourd’hui sur l’arrière-pays. Une passion le prenait même, en lisant tant de vieux livres, pour cet El Dorado de jadis.

Maintenant il mettait sa science en œuvre. L’Éden découvert par Juan de la Cosa, compagnon de Christophe Colomb, le pays de rêve et de charmes infinis dont parlent Moralés Maggiolo, Diego Robero et Battista Agnese, était pour lui la terre maudite entre toutes, d’où il vou-