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nable tristesse. Et la pluie venait corser cela de son crépitement irritant.

James-Athanase Sirup se prit la tête à pleines mains. Il lui faudrait, dans peu de minutes, sortir pour ne plus rentrer. Car il était fichu à la porte de ces lieux, faute d’avoir su trouver à temps les ors nécessaires à l’offrande trimestrielle réclamée par les dieux de la propriété.

Il lui faudrait s’en aller par la ville, avec un vêtement usagé et sans prestige, la poche vide, le ventre vide, et sans amis ou connaissances propres à le servir.

La perspective pouvait passer pour peu folâtre. Mais que faire, par Satan, que faire ? James-Athanase Sirup était au vrai un charmant jeune homme de vingt ans et peu de mois. Gracieux, il savait plaire, mais jusqu’ici une timidité quasi féroce lui avait interdit de tirer avantage de ses dons moraux plastiques et intellectuels. Timide, on ne saurait réussir ni dans les affaires, ni dans l’amour. Cela n’a aucun emploi dans la vie, la timidité, sauf au fond des provinces les plus reculées, pour faciliter le mariage des filles sans dot. Mais aujourd’hui même, l’audace des décolletés suggestifs, des jupes écourtées et des entrevisions galantes finit par primer la chaste crainte si affriolante jadis.

Ainsi le malheureux Sirup serait bientôt seul au monde à garder cette vertu timide rejetée même par les vierges provinciales. Il songeait à tout cela avec âpreté et un rire narquois le secoua.

— Si encore on voulait m’exposer dans un musée tératologique, à côté de l’homme serpent, du veau à trois têtes et de la poule qui parle ?

Hélas ! la timidité a perdu tout prestige, mais n’est pas encore une curiosité de musée.

— Hé bien ! s’écria James-Athanase Sirup, c’est bien simple, je vais me mettre voleur !

Il sauta du lit à terre, fier de cette décision plus que d’un