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RECUEIL INTIME


Rien ne demeure alors de tout ce qui charmait.
Les yeux qu’on trouvait doux, le cœur où l’on dormait
Dans le hamac ou les gondoles,
On se sent pris pour eux de haine et de courroux.
Les espoirs écroulés se changent en dégoûts,
Et l’on crache sur ses idoles.

Jeune fille, ton front resplendit de clarté ;
Tes cheveux ont l’éclat, ta joue a la santé ;
On se retourne quand tu passes.
Âme au vol plus léger qu’une aile d’alcyon,
Tu mêles la candeur avec la passion,
Les tendresses avec les grâces.

Et, troublé malgré moi, lorsque tes beaux grands yeux
Répandent leurs rayons sur mon front soucieux,
Je me sens comme une couronne,
Je rêve de bonheur, de gloire, d’avenir,
Je voudrais m’élancer à tes pieds, devenir
Quelque chose qui t’environne.

Et, sans avouer rien, je m’épuise à trouver
Des vers mystérieux qui te fassent rêver,
Qui, drapés à moitié de voiles,