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RECUEIL INTIME


J’entends de loin la foule aveugle
Prendre plaisir à la huer ;
Et l’on sait que le taureau beugle,
Alors qu’il s’apprête à tuer.

Mais si jamais, ô ma divine,
Dans ce siècle où les dieux s’en vont,
Je dois, dans la même ruine,
Voir s’écraser ton noble front,

Moi, je te mettrai dans la bière,
Avec un beau suaire blanc,
Et j’irai dans le cimetière,
Ensevelir ton corps sanglant.

Puis, sentant ma force qui tombe,
Le cœur brisé de trop souffrir,
Je me coucherai sur ta tombe
Et je m’y laisserai mourir.