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LX
PRÉFACE.


savoir ce qu’il va rejeter. D ’abord, les exagérations qui déforment. Il n’a qu’à faire appel à sa propre expérience. Il n’a jamais décrit de grandes passions, mais il lui souvient d’avoir voulu expliquer un homme par un seul tic ridiculisant. Il n’a jamais été le père d’un Gobseck ou d’un Grandet, mais il l’a été d’homuncules. Quittant ceux-ci, sans nourrir l’ambition de sculpter dans le marbre ou dans le granit des figures d’Apocalypse, il a découvert homme moyen, celui qui n’est pas une " force qui va ", fouettée par le démon de l’argent ou de la luxure.

Ensuite, le réalisme strict de Maupassant serait assez son fait , comme il le fut a ses débuts. Il a cessé de trouver son compte dans ces... contes dont un assez grand nombre sont parfaits en soi, mais qui bientôt lui ont paru déformer la vie en ce qu’ils groupent par artifice certains éléments dans le dessein d’obtenir un effet prévu.

George Sand, enfin, lui convient moins encore. Je suppose qu’il n’en discute point la poésie diffuse, mais j'ai la certitude qu’il proteste contre de superflus rappels d’humanisme. Lui qui affirme qu’une page doit être belle en elle-même, il en dirait autant de la nature. Il estimerait que, si tant est qu’une scène de labour en Berri ou ailleurs ne soit pas dépourvue de grandeur, c’est une faute de goût que de rappeler, à ce propos, Holbein et Virgile, et que c’en est une autre que de comparer un petit paysan de six à sept ans au " petit saint Jean-Baptiste des peintres de la Renaissance. " Et puis, l’idylle n’est pas son fait. Si le lyrique s’y laissait aller, l’humoriste qui n’est pas mort en lui aurait vite fait de le rappeler au souci des convenances littéraires, Diane ou Vénus, il nous prévient une fois pour toutes. A son mari qui fauche et qui doit avoir soif, Mme Philippe apporte une bouteille d’eau. Il boit et se repose un instant. Elle-même, après avoir cueilli des tremblettes, " s’essuie le visage avec son tablier.