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LIV
PRÉFACE.


et Maurice, Marthe et Pierre, assez loin de Marivaux et de Becque, dissertent de leurs états d’âme en êtres que ne vue pas le ridicule ; il y faut ajouter, postérieur de sept années, Monsieur Vernet, où les personnages de l'Ecornifleur passent du plan de la psychologie humoriste au plan de la psychologie simplement humaine. Si les champs n’avaient pas fini par l’absorber tout entier même lorsqu’il vivait à Paris, je crois bien qu’à sa première œuvre "parisienne " il eût ajouté d’autres correctifs, qu’il en eût fait d’autres mises au point ; il est à remarquer, en tout cas, que les trois que nous en possédions sont du ressort du théâtre.

Lui qui, naguère, mettait une sorte d’orgueil a ne pouvoir parler des paysans qu’avec l’aide de Balzac, voici qu’il est fier, aujourd’hui, de vivre parmi eux, et il n’en fera point des homuncules. " Je serai un homme chez ces hommes coupeurs de terre ", comme les appelle Marot. Mais je garderai l’œil de l’artiste, cet œil pur, incorruptible, que rien ne blesse, car toute la vie est à voir. Je deviendrai un artiste humain. " Il l’était déjà depuis plusieurs années lorsqu’il écrivit cela à propos des élections municipales, à Chitry, du 15 mai 1904.

Mais, pas plus que pour les gens de lettres ni que pour ceux du monde, nous ne pouvons attendre qu’il nous décrive les paysans à l’aide de clichés. Sur eux il ne se faisait aucune illusion. Mauvais point de départ, diront les amateurs de littérature rose ou bleue, pour nous les rendre sympathiques. Hé ! braves ignorantins, d’où savez-vous que ce doive être, par définition, la fin dernière de l’art ? Il me, disait : " Les paysans, je les ai montrés tels qu’ils sont, des hommes pareils à ceux des villes. On leur a fait une réputation de finesse qu’ils ne méritent pas et dont — je dois le dire à leur décharge, — ils ne se doutent nullement. Qu’ils s’entendent mieux que nous