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APPENDICE


l'aspect d’un chartreux ou d’un trappiste, et il ferait à merveille sous le capuchon blanc ou marron d’un de ces deux ordres ; peut-être un de ces jours ira-t-il s'enfermer dans un lointain comment, les vrais poètes étant tous plus ou moins fous.

Le même Camille Delaville, quand parurent les Roses, devait, cette fois dans la Revue Verte (numéro du 25 juillet 1886), attirer l’attention sur cette mince brochure ne contenant que deux poèmes et il le fit en ces termes :

" II s'agit de vers encore — pas un volume cette fois — une simple plaquette sans la moindre moralité, ni la moindre prétention, un pastel merveilleux de charme et de couleurs, comme les fleurs que chante l'auteur en un chant plein d’amour et d’harmonie. Il rêve d’un paradis amoureux uniquement orné de roses ; il les passe toutes en revue des plus arrogantes jusqu’aux plus modestes, rouges ; pourprées, blanches, soufrées, moussues.

Jules Renard est fort jeune ; tandis que ses vers font leur chemin dans le monde ; lui y volontaire d’un an, fait l’exercice et se prépare sans enthousiasme aux grandes manœuvres.

Bon courage au soldat de dix-neuf ans, qui trouve sans doute le sac un peu lourde bon espoir au poète plein de talent qui va bientôt rentrer dans la studieuse mêlée parisienne, ou les roses, hélas ! ont tant d’épines et si peu de parfum ! "

A la vérité Fauteur de ces lignes trouva peu d’écho. Ce n'est que dans les Chroniques de mai 1887 que nous trouvons le nom du jeune auteur cité à propos de la publication d' "une Passionnette " dans la Revue de Paris. " Une nouvelle, ingénieuse d’idée, très nette de Style où M. J. Renard étudie la vivacité parfois tragique des passions enfantines. "

De Crime de village dans la Revue des Livres nouveaux, Gaston d’Hailly (n° du 15 novembre 1888) put dire encore :

" Les nouvelles de M. Renard, " Crime de Village " n’ont été tirées qu’à 65 exemplaires dont trois sur Japon, c’est le début d’un jeune homme, début qui promet. L'auteur y dont le style est très coloré, nous donne huit nouvelles paysannes dont la première sert de titre au volume. Les villageois sont pris sur le vif, et dans ces petites études tantôt dramatiques, tantôt tendres, légères parfois, on sent palpiter les passions bonnes ou mauvaises de ces êtres qui cachent sous le masque de la simplicité la duplicité, la haine ou l’envie, l’amour et la candeur, tout cela présenté dans une tournure très originale.

Mais c'est seulement avec Sourires Pincés et sans doute grâce à la fondation du Mercure de France que Jules Renard devait voir s'établir sa jeune renommée dès l’apparition du volume, peut-on dire, puisqu’en novembre 1890, un mois à peine après