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JULES RENARD


sans doute légèrement acidulée. On en goûterait, car on ne voit d’abord en elle qu’un instrument de précision propre aux opérations mystérieuses et compliquées de l’amour. Soudain, effarement, recul de buste ! Voilà que, d’une manière inopportune, bruyamment, interminablement, ça se met à retentir !


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Heureux celui dont la bonne amie possède une belle voix ! Il peut la faire chanter et, avec d’adroits compliments, l’encourager, l’épuiser, et peu à peu lui fatiguer sa langue jusqu’à la mettre hors de service. C’est autant de gagné contre son bavardage.


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— O poétesse !

— Mais je ne fais pas de vers !

— En êtes-vous sûre ?

— Non, là, bien sincèrement, je vous affirme que je n’en fais que de tout petits, sans prétention, pour les amis et quand je suis triste. C’est bien comme sentiment, voilà tout. Mais j’aime follement tous les vers, et, quand j’en entends dire, je pousse, en signe d’émotion, un petit sifflement prolongé, comme un serpent à sonnettes auquel on donnerait des coups de cravache ; et je sens alors, oh ! je sens, très bien que, si j’avais travaillé, j’aurais pu faire une bonne actrice, une grande actrice pour la tragédie sérieuse, avec des strophes dedans.


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Aujourd’hui si démodées, les banales plaisanteries contre la femme de lettres furent toujours