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SOURIRES PINCÉS


VI

La vendange

Tout le jour, semblables à des épouvantails en vie, des êtres effrayants ont coupé le raisin. Au pied des ceps, des feuilles rouillées s’efforcent, en voletant, de raccrocher leur queue à quelque chose. De retour les oiseaux modulent leur surprise :

— Qui donc, sans eux, a vendangé leur vigne ?

Et les merles soupçonneux observent de travers l’attitude des grives.


VII

Le pêcheur à la ligne

Les ruisseaux accourent au bassin où se repose la rivière. L’un apporte le murmure câlin de ses joncs ; l’autre, sur un mince filet clair, pur de toute boue, écrémé sous les dents de la roue du moulin, tout essoufflé et comme toussotant, pour avoir tant sauté de cailloux, apporte le plain-chant des canards du village, tandis qu’au milieu du bassin, où s’égrène un vol de mouches, les poissons font des ronds à fleur d’eau, paillètent, et, repus, loin des bords, se demandent entre eux à quoi s’occupe ainsi le pêcheur à la ligne ?