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par les deux épaules. Le curé s’appuyait au mur, disant :

— Mon ami, c’est trop, je crois que c’est trop, vois-tu ; assez pour une fois, mon ami.

Moru lui passa son bras sous le sien, moins pour l’aider que pour se soutenir, et ils s’entraînèrent, mouillés et chancelants.

Moru criait :

— Hue ! hue donc, Benoit.

Le curé répétait :

— Mon ami, c’est trop, nous nous dégradons comme des gens de peu. Que diront… que dira… mon ami… mon… a… mi…



III


Ils étaient tous les deux au milieu du petit pont, appuyés sur la barre de bois transversale qu’on y avait attachée avec de l’osier pour les piétons, heureux et partageant leur bonheur en frères.

— On n’est pas trop mal, disait Moru.

— Certes, Moru, je n’en pouvais plus de chaleur, disait le curé.

Soudain, trop saisi par le froid, il tomba comme un paquet mou ; Moru eut à peine le temps de l’empêcher de couler à l’eau, en se retenant à la barre de bois.

Il le regarda, hébété, un peu dégrisé, ne sachant que faire, embarrassé de cette masse qu’il faudrait porter tout entière maintenant.

— Eh ! Benoit, réveille-té donc, V’là que tu dors, à c’t’heure.