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— Les renards ?

— Comment, vous ne savez pas ? dit la Rollet, d’une voix flûtée. Ah ! des malins. Ils attendent qu’il y en ait tout plein ; alors ils roulent en boule un paquet d’herbes sèches qu’ils se fourrent dans la gueule, puis ils vont à la rivière et y trempent avec précaution le bout de leur queue. Les puces ont peur de l’eau comme les poules. Elles remontent la queue, prenant les autres sur leur chemin. Le renard enfonce de plus en plus, lentement ; les puces remontent, remontent, arrivent à la tête, à la gueule, puis, ne trouvant plus de sec que la boule d’herbe, s’y mettent toutes. Le renard les lâche dans l’eau et se sauve.

C’était gentiment imaginé, comme on voit.

La Collard s’amusait, incrédule, cherchant un moyen de l’attraper à son tour. Elle la vit subitement s’endormir de ce sommeil lourd où se dissolvent toutes les fatigues du jour, qui ferme les yeux comme une plaque de métal.

Elle avait trouvé. Elle tira tout le lourd édredon à elle, le roula, le tassa sous ses draps à sa place ; puis elle se coula dans la ruelle.

La Rollet dormait sur le dos, la bouche entr’ouverte par un souffle léger, les bras tendus à ses côtés comme une Statue ridée couchée sur un tombeau. Au-dessus de sa tête se penchaient un christ noir, une vieille gravure, un grand ange à genoux, en prière, dont la tête disparaissait près qu’entière entre les deux ailes démesurées, comme dans un béguin de religieuse.

En un coin de mur, un grillon poussait obstinément son cri-cri mélancolique.

Du fond de son sommeil, elle sentit sur sa poi-