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JULES RENARD


Soudain calmé, d’un coup rendu,

Tu cesses, mais chacun en doute.

Tel qui ne t’a pas entendu

Croit t’entendre encore et t’écoute.


Nul n’ose bouger ; par effroi,

Faut-il en croire ton silence ?

Et craintivement chacun lance

Un coup d’œil inquiet vers toi :


Mais c’est bien fini. Les bobèches,

— Car tout le temps qu’on t’ écouta

La bougie en elles, goutta, —

Les bobèches touchent aux mèches :


Et franchement il était temps !

Quitte à se casser par ta faute,

Un vieillard se détend et saute

Sur ses jarrets de soixante ans.


Cependant que chacun trépigne

A son aise et pousse un " hélas ! "

Tu te retires, jamais las,

Dans un coin du salon, très digne.


Et déjà maint corps fatigué

Tout en l’air se désankylose.

On danse, tu deviens morose ;

On s’exclame, et tu n’es pas gai.


Peut-être faut-il pour te plaire,

Beau monologuiste vainqueur,

Qu’une des dames t’offre un cœur

Dont elle ne sait plus que faire ?