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JULES RENARD


En mesure, un pas, puis un pas,

Ils vont longtemps d’un arbre à l’autre.

Il est moins frêle que le nôtre,

Le calme des petits soldats.


Puis ils font la guerre pour rire

Dans un espace limité.

De toutes parts on les admire :

C’est joliment bien imité.


" Je suis comme un vaisseau sans voiles ",

Dit un médaillé d’autrefois ;

" Ma poitrine est pleine d’étoiles,

Mais ma jambe gauche est en bois. "


Et peut-être que quelque femme

Songe à l’un d’eux, bien loin, là-bas.

Vraiment on n’a pas moins une âme

Pour jouer aux petits soldats.


Puis la nuit surprend l’exercice.

Le retour sonne à l’horizon.

Et bébé dit à sa nourrice :

" Ils vont rentrer à leur maison. "


Le lendemain la place est vide.

Les soldats ne reviennent plus.

Le citadin écoute, avide,

Ce qu’il entend de bruits confus.


Mots magiques : patrie et guerre,

Toute la rumeur des combats.

Un silence pèse où naguère

On jouait aux petits soldats.