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douceur ne le surprit point. Il était bien décidé à tout affronter. Il prit une pose raide, serra ses jambes et s’enhardit, au mépris d’une gifle. Car c’était, chez Monsieur le Directeur, une innocente manie d’abattre, de temps en temps, un élève récalcitrant du revers de la main : vlan ! L’habileté pour l’élève visé consistait à prévoir le coup et à se baisser, et le Directeur se déséquilibrait, au rire étouffé de tous. Mais il ne recommençait pas, sa dignité l’empêchant d’user de ruse à son tour. Il devait arriver droit et du premier coup sur la joue choisie, ou alors ne se mêler de rien.

— « Monsieur, dit Véringue réellement audacieux et fier, le maître d’étude et Marseau, ils font des choses ! » —

Aussitôt les yeux du Directeur se troublèrent comme si deux moucherons s’y fussent précipités soudain. Il appuya ses deux poings fermés au bord de la table, se leva à demi, la tête en avant, comme s’il allait cogner Véringue en pleine poitrine, et demanda par sons gutturaux :

— « Quelles choses ? » —

Véringue sembla pris au dépourvu. Il attendait (peut-être, après tout, que ce n’était que différé) l’envoi d’un tome massif de M. Henri Martin,