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yeux, bien éveillé d’ailleurs, et tout au souvenir de l’aventure dont il ne savait que penser. Il n’y voyait rien de vilain qui pût le tourmenter, et cependant, dans la nuit des draps, l’image de Violone flottait lumineusement, étrange et douce comme ces images de femmes qui l’avaient échauffé en plus d’un rêve.

Véringue se lassa d’attendre. Ses paupières, comme aimantées, se rapprochaient. Il s’imposa de fixer le gaz, presque éteint ; mais, après avoir compté trois éclosions de petites bulles crépitantes et pressées de sortir du bec, il s’endormit.


III


Le lendemain matin, au lavabo, tandis que les cornes des serviettes, trempées dans un peu d’eau froide, frottaient légèrement les pommettes frileuses, Véringue regarda méchamment Marseau, et, s’efforçant d’être bien féroce, il l’insulta de nouveau, les dents serrées sur les syllabes sifflantes :

— « Pistolet ! pistolet ! » —

Les joues de Marseau s’empourprèrent, mais il répondit sans colère, et le regard presque suppliant :

— « Puisque je te dis que ce n’est pas vrai, ce que tu crois ! » —