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sa mère, parents terribles. La mère l’avait prévenu tout de suite :

— « Je ne veux pas que tu quittes la ferme après la soupe. » —

— « Mais, maman, qu’est-ce que je fais ? Je ne fais rien, moi ! » —

— « Prends bien garde, ou je te donne une calotte ! » —

Une calotte ! Pierre haussait les épaules. La Griotte, comme on appelait sa mère, du nom de la cerise à courte queue, n’avait pas changé pendant son absence. Elle semblait toujours aussi aigre, et même aussi bonne qu’auparavant. Elle aimait ses enfants d’une manière bizarre, méchante et dure le plus souvent, mais toute en pleurs dès que son fils écrivait :

« J’ai couché cette nuit à la salle de police. » et dès que l’une des deux sœurs se faisait venir le sang au bout du doigt d’une brusque piqûre.

— « Mais, maman, je ne suis pourtant plus un gamin ! » —

— « Tais-toi donc, nez mou. Je te défends de courir le guilledou. M’entends-tu ? » —

À ces mots, les deux sœurs, en train de coudre avec application près de la fenêtre, les joues ca-