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l’hameçon

— Tu m’as fait mal, va, mon cher petit. Oh ! je ne t’en veux pas ; ce n’est pas de ta faute.

Jamais elle n’a parlé sur ce ton à Poil de Carotte. Surpris, il lève le front. Il voit le doigt de sa mère enveloppé de linges et de ficelles, propre, gros et carré, pareil à une poupée d’enfant pauvre. Ses yeux secs s’emplissent de larmes.

Madame Lepic se courbe. Il fait le geste habituel de s’abriter derrière son coude. Mais, généreuse, elle l’embrasse devant tout le monde.

Il ne comprend plus. Il pleure à pleins yeux.

— Puisqu’on te dit que c’est fini, que je te pardonne ! Tu me crois donc bien méchante ?

Les sanglots de Poil de Carotte redoublent.

— Est-il bête ? On jurerait qu’on l’égorge, dit madame Lepic aux voisins attendris par sa bonté.

Elle leur passe l’hameçon, qu’ils examinent curieusement. L’un d’eux affirme que