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le toiton

— Il n’y est pas, le petit animal. Où diable est-il ?

On s’éloigne, et le corps de Poil de Carotte se dilate un peu, reprend de l’aise.

Sa pensée parcourt encore de longues routes de silence.

Mais un vacarme emplit ses oreilles. Au plafond, un moucheron s’est pris dans une toile d’araignée, vibre et se débat. Et l’araignée glisse le long d’un fil. Son ventre a la blancheur d’une mie de pain. Elle reste un instant suspendue, inquiète, pelotonnée.

Poil de Carotte, sur la pointe des fesses, la guette, aspire au dénouement, et quand l’araignée tragique fonce, ferme l’étoile de ses pattes, étreint la proie à manger, il se dresse debout, passionné, comme s’il voulait sa part.

Rien de plus.

L’araignée remonte. Poil de Carotte se rassied, retourne en lui, en son âme de lièvre où il fait noir.

Bientôt, comme un filet d’eau alourdie par le sable, sa rêvasserie, faute de pente, s’arrête, forme flaque et croupit.