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LA CANTATRICE

Devais-je en avertir l’intéressé ? J’hésitai là-dessus jusqu’à la fin du dernier acte, et conclusion : j’optai contre le persécuteur de ma protégée, en faveur du vieillard. L’adversaire de Borelli ne pouvait être qu’un ami de l’opprimée, un allié de moi-même ; c’était donc elle et non l’Italien qu’il importait de renseigner au plus tôt.

Dans l’espérance que l’homme joufflu se livrait encore sur la grève aux besognes ténébreuses que j’avais troublées la nuit précédente et qui, sans doute, l’empêchaient de quitter le littoral, — je me rendis aux Mouettes.

Le concierge assoupi bégaya que ni M. ni Mme Borelli n’étaient rentrés du théâtre, — qu’il le certifiait, — que du reste ils ne rentraient jamais avant trois ou quatre heures du matin, — qu’il me l’avait déjà dit tout à l’heure, et qu’il ne comprenait pas pourquoi je le réveillais deux fois de suite pour lui demander la même chose.

La nouvelle de cette double absence embrouillait mes notions et renversait mon plan. De plus, le vieillard avait passé par là. Je