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LA CANTATRICE

dront comme interprète. On écrira pour elle des rôles sur mesure, épisodiques, immobiles ou cachés, des rôles admirables d’originalité ! des rôles de voix et non de personnes ! Que sais-je… Et puis, nous avons la ressource des concerts ; de ce côté, le champ est libre !… En tout cas, mon cher, il faut la faire entendre. Songez donc ! Il s’écoulera peut-être des siècles et des siècles avant qu’un tel prodige vocal se reproduise, — s’il se reproduit ! Je suis même ahuri de ce que votre pensionnaire ne soit pas illustre en dépit de son infirmité. Où diantre avez-vous déniché ce rossignol ? »

— « Je l’ai vue pour la première fois il y a huit jours. Elle est arrivée un soir dans mon cabinet, amenée par le mari, ou du moins par l’individu qui se prétend le mari. C’est un personnage assez inquiétant, louche d’aspect et d’allures. Tous deux, nippés de frusques sans nom, paraissaient dans la misère. Cependant, leur mine respirait la santé de vagabonds accoutumés au grand air. Je pense qu’ils venaient d’Italie, peut-être en mendiant… Mais, somme toute, on ne sait pas d’où ils viennent. M. Borelli a débattu