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LA CANTATRICE

m’échapper vers les coulisses à la découverte du phénomène.

Gunsbourg, le directeur, se trouva sur mon passage. Il était radieux.

— « Hein, mon cher, quelle révélation ! »

— « Mais qui est-ce ?… Borelli, Borelli… Un pseudonyme ?… C’est miraculeux : une voix de jouvencelle et une expérience de vieille artiste ! Mâtin ! quelle autorité ! quelle chaleur ! quelle… »

— « Quelle révélation, hein ! »

Gunsbourg n’en revenait pas lui-même. Pour moi, je n’avais qu’une idée : engager la Borelli à l’Opéra-Dramatique. Et je l’avouai franchement. Mais Gunsbourg secoua la tête d’un air goguenard.

— « Ça, vous savez, c’est une autre affaire ! »

Je supposai qu’il avait traité avec la chanteuse pour une longue série de représentations. Il me détrompa, mais n’en jura pas moins — toujours d’un ton railleur — que jamais Mme Borelli ne paraîtrait sur le plateau de mon théâtre.

— « Est-ce donc qu’elle ne sait pas jouer ? » questionnai-je. « Bah ! Elle apprendra. C’est