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LA GLOIRE DU COMACCHIO

Brutal, il cognait ses poings l’un contre l’autre et les faisait se battre comme deux béliers. Il les contempla subitement, et poussa des rires imprévus.

— « Qu’avez-vous ? » s’enquit le Juif.

— « Ce que j’ai, mon mignon ? Ah ! ah ! j’ai que si ma dextre s’endolorit des coups de ma senestre, ma senestre s’endolorit aux coups de ma dextre !… J’ai, charmant Tubal, qu’on ne se frotte pas seulement l’œil gauche pour éclaircir l’œil droit, mais encore l’œil droit pour éclaircir l’œil gauche !… J’ai… »

« Il est fou ! » pensa le Juif.

La rue s’animait au passage d’un nouveau groupe : une dizaine de gentilshommes derrière un porteur de fanal, tous enveloppés de sombre, coiffés d’autruche et masqués. Ils disputaient d’une manière importante, et l’un, de taille avantageuse, marchait cambré, les coudes aux épaules de ses voisins.

Mais Cesare et Tubal n’étaient plus dans la chambre pour les remarquer.

La bande emplumée franchit le seuil du