Nous étions sous la toiture de l’hôtel, et la charpente assemblait ses poutres en enfilade au-dessus de la multitude des robes.
À la vue de celles-ci, Mme Lefreu se prit à gémir, donnant libre cours à sa pitié.
C’est que, d’avoir été neuf ans sous séquestre, d’être poudreux, rongé, abandonné, le musée de Mme d’Ombrevannes ressemblait au passé lui-même, et rien n’était plus impressionnant que cette vision rétrospective. Décembre finissait ; un froid d’hiver et de grenier nous glaçait l’âme et le corps, — un froid qui sentait le renfermé, la souris et le poivre, — un froid comme il doit en faire là-bas, dans le pauvre passé où demeurent, silencieuses et mornes, les larves de tout ce qui fut. Mon Dieu ! ces robes d’adolescence, ces robes d’été, ces robes de bal, dans ce grand froid noir !
Ce furent des yeux humides que je tournai vers la princesse d’Ombrevannes.
« Quoi ! me disais-je, cette menue créature sombre et touchante, voici donc la chrysalide de toutes ces enveloppes innombrables, l’une après l’autre quittées pour des métamorphoses sans fin ! »
Je ne pus me retenir de l’examiner passionnément. Un feu soudain lui colorait les joues, ses yeux ressuscitaient… Elle devait remuer dans sa mémoire profonde, d’incomparables souvenances. À cette heure de vieillesse avancée,